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L'Imaginarium du Dr Cinéma

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Coups de coeur et coups de gueule, l'Imaginarium se veut le reflet du cinéma que j’aime. Bienvenue dans un monde qui défile en 24 images par seconde !


J'ai rencontré César

Publié par Imaginarium du Dr Cinéma sur 30 Juillet 2014, 06:24am

Catégories : #"J'ai rencontré..." - petites nouvelles incongrues

J'ai rencontré César

 

 

J’ai rencontré César…

 

…un samedi après-midi, dans une épicerie américaine de la baie des singes près de Clermont-Ferrand. Il engloutissait un pot de beurre de cacahuète au rayon produits du monde avec une petite cuillière. Je l’ai reconnu tout de suite, son poil soyeux, son regard dur et tendre à la fois, son odeur forte mais légèrement excitante et puis surtout, un singe, c’est un singe. Je me suis approché, il pleurait. Je lui ai offert une banane. Il m’a raconté sa triste histoire.

Lorsqu’il vivait dans la cage d’un laboratoire de San Francisco, les chercheurs écoutaient en boucle Elvis Presley. Depuis cette époque César avait gardé une passion pour le King. Il avait même cherché à lui ressembler, banane sur le crâne, blouson en cuir et beurre de cacahuète dans l’estomac. Gros succès auprès de la gente féminine simiesque… mais au fond de lui-même, César avait toujours ressenti une profonde tristesse, une frustration grandissante, celle de ne pas pouvoir chanter Love me Tender ou Jailhouse Rock… Certes il pouvait prononcer quelques mots, quelques phrases plus ou moins difficilement, mais chanter, il en était loin. Sur les rayonnages, entre les traces de beurre de cacahuète et les boîtes de nouilles chinoises, un micro doré, une petite statue de la liberté en platique et quelques larmes.

Alors je décidai de l’aider. En vain. Pour la première fois en 30 rencontres, je ne trouvais pas de solution, crotte. Armande Altaï abandonna au bout de 13 minutes, l’opération des cordes vocales de César ne changea pas grand-chose, mes tentatives pour le convaincre de reprendre les tubes d’Elvis dans des versions remixés par David Guetta où il n’aurait qu’un ou deux mots à répéter en boucle échouèrent. Il fallut se rendre à l’évidence, il ne savait pas chanter, ce n’était pas qu’un problème d’évolution mais d’oreille, et en plus il refusait de dénaturer les chansons du King. Mais dans quel monde vivait-il ??? Je n’avais jamais connu un tel échec, je ne pouvais pas accepter. Alors je fus obligé de lui mentir, je lui fis croire que le cirque du soleil voulait l’engager pour la tournée chinoise de son spectacle Viva Elvis. D’habitude méfiant, César, enthousiaste accepta de me suivre sans aucune hésitation. Une fois en chine je le vendis à l’un de mes restaurants préférés, l’Heston Palace de Shangaï dont la spécialité, la cervelle de singe, en faisait la renommée. L’intérêt du plat c’est que l’on déguste la cervelle alors que le singe est vivant, à même le crâne, ce qui permet accessoirement au client, de s’excuser directement auprès du repas pour la souffrance occasionnée.

Bref, je n’en suis pas très fier, mais qu’est-ce que je me suis régalé. Et puis on ne va pas le plaindre, car en plus de m’avoir fait perdre mon temps et de m’avoir pourri ma 30ème rencontre qui aurait dû être une fête, César m’avait refilé une grippe particulièrement désagréable… Mais ça c’est une autre histoire.

 

 

Texte : Erwan Darbellay - Illustration : Yannick Darbellay

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